Elles sont longues ces heures et ces journées, avant le départ !
Les derniers préparatifs sont faits, les derniers pleins aussi, eau, gasoil on est prêt, il n'y a que le vent qui n’est pas tout à fait favorable, mais allez demain ce sera mieux.
Voilà le 2 mai je me suis lancé dans cette longue remontée vers des latitudes qui me rapprochent de la maison, mais qui sont moins hospitalières et moins chaudes.
Là-haut les dépressions passent de l’Ouest vers l’Est et certaines ne sont pas du tout sympathiques. Je suis pas mal équipé pour les voir venir mais on ne peut pas toujours les éviter.
1ère semaine :
Les premières journées ont été assez dures, il fallait serrer un peu le vent et ni Blue Mad ni moi n’aimons cela, surtout que la mer était agitée et ça mouillait sur le pont, Mousse ne savait pas trop où se mettre (la pauvre) et il fait 32° dans le bateau, car bien sûr tous les capots sont bien fermés.
Petit à petit le vent nous offre une route directe, mais il me faut, même si je suis amariné, 4 jours pour bien me sentir à l’aise pour me déplacer dans et sur le Bateau, Mousse mettra 2 jours de plus pour sortir de sa léthargie et pour recommencer à manger quelques croquettes.
Petite moyenne sur ces 8 premiers jours, 90-95 Milles/ jour vers l’arrivée (bien sûr si on n’est pas sur la route directe on fait beaucoup plus de chemin), bref ne vous prenez pas la tête on n’avance pas vite mais ce n’est pas si mal, on a connu pire. Début ensoleillé avec de superbes couchers de soleil, mais on voit que la mer est agitée.
Mais bientôt le ciel se voile de nuages d’altitude, l’air est plus frais, un changement de temps va venir, les fichiers météo et la météo que me donne Christine pas SMS iridium m’en préviennent.
A part ces préoccupations journalières de la météo, les journées et les nuits, sont rythmées par le minuteur qui toutes les heures sonne et appelle l’homme de quart à la vigie (HS après quelques jours il est remplacé par le Mer-veille qui a une fonction réveil).
Une journée type :
Les quarts de sommeil se prolongent souvent le matin, suivant si j’ai bien récupéré ou pas.
Puis on prépare le petit déjeuner et là il y a le petit rituel de l’orange avec Mousse.
Bien sûr quand le temps le permet. Une bonne partie de la matinée se passe à lire, allongé dans ma couchette ; mais on marque toujours les heures avec le réveil et s'il n’y a rien de spécial toutes les 3 heures un petit point sur le carnet de bord, à 12hTU je fais un point sur la cartographie d’OpenCPN et en reliant tous les points on a le sillage de Blue Mad, vous pouvez voir que par rapport à la route directe ma route a subi l’influence du vent (ce n’est pas le rhum).
Souvent pendant le point de 12 h je tire un petit papier dans mon « pot à compagnie » (voir la page belle idée) ces petits mots vous rappellent que vous n'êtes pas seul, c’était bien sympa et permet de garder le lien…
Vers 14 heure je me prépare à manger ; le midi plutôt des salades, bien sûr le frais est vite épuisé, mais il existe des boites de conserve, betteraves, maïs, haricots vert avec un oignon et du jambon en boite, ou salade de riz, œufs dur, ou semoule…..
A 17 h souvent un petit thé avec 3-4 gâteaux.
J’avais acheté des côtes de porc et 2 cuisses de poulet que j’ai faites cuire avant de partir, elles ont duré les 2/3 premiers jours. Sinon le soir c’est plutôt une boite d’un plat tout préparé et puis il y a les boites de Gilles, pâté ou plat cuisiné et quelques surprises (les tomates farcies très réussies, les pâtés aussi).
Mais les ¾ du temps se passe à observer l’horizon, la mer, souvent vide de bateau, d’oiseau, de poisson, baleine ou de dauphin… le ciel, les nuages en essayant de prévoir le temps du lendemain et en admirant les couchers de soleil quand ils ne sont pas masqués par les nuages ce qui a été souvent le cas.
Mais il y a toujours un petit réglage à faire sur un bateau si on veut avancer correctement soit les voiles: je prends un ris puis deux, je relâche un ris, je borde, je déborde, je règle le régulateur d’allure qui barre le bateau…. Qu’il y ait beaucoup de vent ou très peu on est rarement tranquille longtemps, et cela de jour comme de nuit bien sûr, mais si je suis là c’est que j’aime ça.
La pèche, chaque jour j’ai traîné mes deux lignes, au début je n’ai pris que des sargasses
et ce n’est que le 9ème jour que j’ai attrapé une belle daurade Coryphène, et ce sera la seule,
il y a bien eu deux poissons volants qui une nuit ont atterri sur le pont et que Mousse le matin en faisant son tour sur le pont a trouvés, ils lui ont été réservés.
Il y a aussi quelques moments de jeux avec Mousse qui est demandeuse vu qu’elle n’a pas autre chose à faire, c’est une bonne compagnie mais je pense aujourd’hui que ce n’est pas sa place et quelle préférerait gambader dans le jardin (je lui dis que bientôt elle pourra grimper aux arbres courir dans l’herbe et chasser le mulots).
Donc les jours et les nuits s’enchaînent et passent vite, je n’ai pas trouvé le temps long pendant ces 21 jours.
2 ème semaine :
11 ème jour de mer extrait du journal de bord: Ce matin le vent monte petit à petit, d’abord je prends un ris, puis 2 tours dans le génois. Mais cela ne suffit pas, je remplace le génois par la trinquette et je lâche le ris, c’est bon un moment, mais le vent continue à monter et Blue Mad avance 6/7 Nœuds c’est le maxi pour lui d’autant que la mer commence à grossir. Je prends 1 ris pour être plus stable et plus tranquille (ce n’est pas le Vendée globe) la vitesse tombe d’un nœud mais le bateau part de plus en plus souvent au lof. Le vent est travers et parfois ça claque fort sur la coque (Blue Mad est costaud).
17 h ça souffle, j’ai mis un peu de vent sur l’arrière, car la mer tapait fort sur le côté, le régulateur tient bien, même si on fait de beaux lacets, c’est pas grave.
17 h30, le vent monte encore, plus de 25 N sûrement, la mer s’est bien creusée et en plus un petit crachin tombe, puis cela devient un grain.
C’est un joli grain avec du vent de la mer et de la pluie, 1/2 heure après ça se calme. Le speedo est monté à plus de 7 N mais on retombe à 5.5 N c’est plus confortable pour Blue Mad et moins stressant pour moi.
Cet après-midi avec cette pluie, ce ciel bas, ce vent frais ça me rappelle ces premiers jours d’automne après une belle arrière-saison et une grande période de beau temps , on sent que les beaux jours sont derrière nous ,et que l’on va rentrer petit à petit dans des journées moins lumineuses et plus fraîches, Ça met un petit coup au moral.
Mais ce n’était pas fini, après cette accalmie ce n’est plus de la rigolade, le vent est revenu et monte dans «les tours »et la mer qui n’est pas en reste grossie.
Grand-voile à 3 ris et rien devant, Blue Mad court et fuit devant ces masses d’eau qui veulent jouer au chat et à la souris avec lui. Toute la nuit passe comme cela, parfois le vent baisse un moment et j’hésite à remettre un peu de toile, me ravise, et à juste titre car le vent revient de plus belle (j’arrive quand même à dormir un peu).
Le lendemain même programme à part que le soleil brille de nouveau et éclaire cette mer qui toute la journée ne cesse de grossir. C’est beau ! Mais aussi un peu impressionnant.
Je n’ai pas peur, Blue Mad s’en sort bien. Dans cet après-midi où le vent souffle à 30 N avec rafales à au moins 35 N, il faut bien se tenir, des deux mains, on se cale, on s’agrippe avec les pieds, et on ne sort pas dans le cockpit sans crocher son harnais. Pour l’instant je n’ai pas trop l’occasion de sortir pour manœuvrer, la GV est à 3 ris et la trinquette est enroulée.
Un gros grain avec pluie et vent nous tombe dessus, le régulateur n’a pas le temps de redresser Blue Mad qui sous la violence du vent part au lof, et malgré les efforts le régulateur ne redresse pas sa route. Sur le coup j’ai cru que le régulateur était HS. Je prends la barre et redresse le cap, branche le pilote électrique (toujours à poste) qui a du mal à tenir le cap et au bout de quelques minutes se met «off course» : de lui-même le bateau se met à la cape, j’attache la barre sous le vent et règle la GV pour prendre les vagues de côté à 45°sur l’avant. Le temps de prendre ces dispositions, le grain est passé et le vent devient plus maniable, je me remets sur le cap, vent arrière, rebranche le régulateur qui n’a rien, renvoie la trinquette et c’est reparti ! Après toutes ces manœuvres je me sens un peu fatigué : un petit coca, deux tranches de pain avec du pâté de Gilles et une crème au chocolat, de suite ça va mieux.
Mais à l’AIS apparaissent 4 cargos et un voilier, ils sont encore loin, en fait je n’apercevrais qu’un cargo en début de nuit.
Le coup de vent est passé mais il nous laisse une mer agitée qui mettra une bonne journée pour se calmer. Le soleil revient et la température remonte c’est le moment pour prendre un bain, mais fini de se laisser traîner dans l’eau depuis l’échelle, l’eau me parait froide et la mer bien trop agitée.
À suivre.